Alexandre Pachulski, cofondateur de Talentsoft : « Pour que la distance fonctionne, il faut avoir tissé un lien au bureau »

Interview

Alexandre Pachulski

Alexandre Pachulski
Cofondateur de Talentsoft

« Aider chacun à s’épanouir au travail » est l’une des missions de Talensoft. Quel rôle y jouent les bureaux ?

« À quoi servent mes bureaux ? », telle est la question que toutes les entreprises devraient se poser aujourd’hui. Devrions-nous, par exemple chez TalentSoft, diviser notre siège en plusieurs espaces de coworking mieux répartis sur le territoire comme certaines entreprises le font ? Je ne suis pas certain. Un siège social, n’est-ce pas justement un espace de coworking au sens le plus strict du terme, dédié à l’intelligence collective ? Ce sont ces questions que je me pose aujourd’hui. Quoi qu’il en soit, ce qui doit primer, c’est l’engagement collectif, et la façon dont on parvient à trouver la bonne alchimie. La réussite d’une entreprise ne peut passer que par l’épanouissement des individus qui la composent. Si je ne suis pas bien dans mon job, dans ma salle de réunion, je serais moins bon. Le covid n’a en rien changé cela, mais avec les nouvelles pratiques, les bureaux vont devoir s’adapter pour séduire à nouveau, et favoriser la collaboration. Aujourd’hui, je ne fais plus une seule réunion physique sans que l’un des participants ne soit à distance. Les espaces de réunion par exemple, doivent donc s’adapter.

Concrètement, qu’est-ce que cela change ?

Ma conviction, c’est que ce sera plus dur si l’on ne se voit pas. N’oublions pas que 70% de la communication est non verbale. Collaborer à distance, c’est bien sûr possible au quotidien, mais cela devient beaucoup plus délicat lorsqu’il y a des projets complexes à mettre en oeuvre. Avoir des beaux bureaux, des belles organisations, si les équipes ne sont pas motivées, cela ne sert à rien. Les lieux doivent favoriser cet esprit d’équipe, car lorsqu’il y a des moments délicats, c’est ce qui permettra de les surmonter. Les bureaux, le management, l’environnement de travail doit être au service d’une seule mission : prendre en compte les besoins individuels de chacun, les respecter, sans tomber dans l’individualisme.

Si vous deviez repenser vos bureaux, par quoi commenceriez-vous ?

C’est un travail passionnant à faire. Je minimiserais les espaces individuels, mais sans les supprimer, car selon qu’on aime ou pas travailler seul, selon qu’on ait des enfants en bas-âge à la maison, etc., on doit pouvoir s’isoler malgré tout. Je créerais en revanche des pôles collectifs centrés sur les relations informelles, qui sont les lieux où l’intelligence collective d’une organisation s’exprime. Enfin, bien sûr, des espaces plus formels, mais pas austères ! Des « creative rooms », des salles de réunions « phygitales » pour respecter la mixité des usages… Les bureaux restent des espaces primordiaux : quand je vois certaines entreprises les quitter pour s’installer dans des espaces de coworking, je ne peux m’empêcher d’y voir un aveu d’échec terrible. La collaboration, la créativité, on doit être capable de la faire s’exprimer de ses propres espaces !

Certains exemples font-ils figure de modèle pour vous ?

Étonnamment, à une époque où l’on n’a jamais été aussi connecté, à une époque où nous pouvons nous inspirer de toutes les cultures… on n’a jamais fait autant pareil. C’est valable pour les restaurants, les hôtels, comme pour les bureaux. Que vous alliez aux États-Unis ou au Danemark, vous retrouvez les mêmes canapés, les mêmes tables basses. Il faut que les entreprises se posent la question de l’espace de travail qui reflète ce qu’elles sont ! Le rôle des bureaux est fédérateur. Le travail à distance, j’y crois, mais à condition d’avoir tissé un lien personnel entre collaborateurs en amont. Et c’est au bureau que cela se fait. Une fois que le lien s’est créé, la distance devient ensuite possible.