Frédéric Dabi, directeur général Ifop : "Le confinement a accentué une tendance à l’œuvre depuis des années, à savoir le rôle social de l’entreprise"

Interview

À l’issue de confinements successifs, comment les moins de 35 ans se positionnent-ils par rapport à leur entreprise ?

Voilà déjà huit ans que nous réalisons ce baromètre, et cette année est marquée par les réponses singulières apportées par la jeune génération, particulièrement touchée par les confinements et leurs impacts sur leur vie sociale, leurs habitudes de sorties, de rencontres. Ainsi, la crise sanitaire les a semble- t-il rapproché de leur employeur, de ses valeurs, de son rôle social. Ils étaient 69 % à se dire attachés à leur entreprise avant les confinements, ils sont aujourd’hui 78 % à l’affirmer. Leur engagement se traduit également dans le temps puisqu’une part de plus en plus importante souhaite continuer à travailler dans leur entreprise actuelle plus de deux ans.

Pour eux, quel rôle joue le bureau ?

Le confinement a accentué une tendance à l’œuvre depuis des années, à savoir le rôle social de l’entreprise. Avant même le confinement, les salariés - et en particulier les plus jeunes - déclaraient venir au bureau pour la vie sociale (46 %). C’est en hausse de trois points à l’issue du confinement. Signe très fort d’une forme de confusion entre les frontières du monde du travail et de la sphère privée, une majorité de jeunes salariés (55 % chez les 20-25 ans, 53 % parmi les 30-35 ans) considèrent leurs collègues comme des amis, soit un résultat près de deux fois plus élevé que celui observé chez les plus de 50 ans (29 %).

Pour la jeune génération, ce rôle social s’étend-il hors des murs du bureau ?

Sortir de son lieu de travail pendant la journée est devenu pour les jeunes salariés une nouvelle norme. Notons à cet égard que ces comportements adoptés récemment font tache d’huile et donnent à voir une jeunesse diffusionniste, susceptible d’influencer les pratiques des autres générations. Les espaces extérieurs sont également plébiscités par les plus jeunes, notamment pour réaliser des activités professionnelles, signe d’une délimitation plus floue des frontières de l’espace de travail. Le choix du lieu de travail s’inscrit même plus largement dans le choix d’un quartier : c’est donc une logique servicielle, autour de l’entreprise et de son environnement immédiat qui s’organise sous la houlette de cette nouvelle génération. Cela vaut également s’agissant du rôle social de l’entreprise et de ses engagements en faveur des combats que cette génération veut mener : le climat, l’inclusion, les inégalités...

Frédéric DABI, Directeur général Ifop