Marc Lhermitte, Associé EY : « Pour penser le bureau du futur, il faut penser le futur de la ville »

Interview

« Pour penser le bureau du futur, il faut penser le futur de la ville »

Associé chez EY, Marc Lhermitte observe depuis plus de vingt ans le pouvoir d’attractivité des grandes métropoles européennes. Selon lui, Paris et Londres sont très en avance... mais l’Europe du Sud et Berlin parviennent à se différencier pour séduire.

Vous êtes spécialiste de l’attractivité : qu’est-ce qui distingue Paris, Londres, Berlin et Madrid ?

À vrai dire, ces quatre métropoles ne jouent pas tout à fait dans la même catégorie. Londres et Paris sont considérées comme des « villes mondes », ce qui se traduit par des implantations de siège sociaux, segment dominé par les Britanniques depuis vingt-cinq ans. Avec le Brexit et l’amélioration de l’attractivité et de la compétitivité de la France, Paris a fortement progressé, bien plus que Berlin et Madrid. Alors que beaucoup d’entreprises se posent la question de leur usage des bureaux, nous voyons d’autres « challengers » émerger, comme Amsterdam, Bruxelles ou encore Dublin qui ont réussi à attirer des fonctions de sièges, notamment dans la technologie, la santé ou les services.

Sur quoi misent ces villes ?

Si Londres, aidée par le système fiscal britannique, est « fabriquée » pour attirer des sièges et des cadres à hauts revenus, Berlin, au-delà d’être capitale de la première économie de l’Union européenne, est une métropole à dimension multiculturelle. C’est un atout important qui lui permet de séduire beaucoup d’entreprises…y compris EY. Ses caractéristiques en matière d’innovation urbaine et sa sensibilité environnementale sont tout à fait alignées avec les ambitions ESG des entreprises. Nous observons également que les grandes villes d’un arc au sud de l’Europe attirent actuellement les investissements, séduits par le rebond des taux de croissance post-Covid et d’importants bassins d’emplois. Citons Athènes ou Lisbonne qui intéressent beaucoup d’utilisateurs actuellement.

En quoi le recours au télétravail a-t-il un impact sur l’attractivité des entreprises ?

Prenons l’exemple d’EY. À Paris nous sommes absolument candidats à l’hybridation du travail car nos métiers s’y prêtent et nous nous y adaptons progressivement. Chez nos clients, l’hybridation se fait à des degrés et sous des formes très variées, selon le secteur, le métier et les générations. Mais le bureau reste un lieu social et il lui faut renouveler ce contrat social et y adosser un contrat territorial. Par exemple, chez EY, la moyenne d’âge est de 29 ans. Nous faisons le maximum pour rendre attractive l’activité au bureau, entre innovation, échanges et formation. Mais nous y encourageons aussi les sas de décompression et les occupations extra-professionnelles. Par ailleurs, nous sommes très attentifs à la ville et au territoire dans lequel nous sommes implantés. Nous nous impliquons auprès des collectivités, et au côté d’autres entreprises, pour faire remonter perspectives et suggestions sur ce que doit être la ville pour nos équipes, en termes de mobilité, de mixité et d’attractivité.